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20 juin 2007

Un dernier baiser


Cher Philippe,


J'ai une faveur à te demander.

Oh, une toute petite faveur, rassure-toi, rien qui ne te soit impossible, rien qui ne te compromette. Rien d'illégitime, non plus - enfin, tu jugeras.
Voilà les faits : depuis bientôt sept mois, tu as peut-être remarqué que je te consacrais mon temps, mon énergie, mon babil, et bien d'autres artifices qu'il serait trop long de citer ici. Si, par le plus extraordinaire des hasards, tu ne t'es pas aventuré en personne sur ces pages à ta gloire, je doute que personne, autour de toi, ne te les ai signalées - l'efficacité du système orwellien qui nous entoure fait que, vois-tu, je sais bien qu'on les visite depuis Radio France, ces pages. Admettons toutefois que tu n'en aies rien su, d'où tes silences, et que tu me lises aujourd'hui pour la première fois.
Aujourd'hui, c'est-à-dire à quelques jours à peine de la dernière émission de la saison, l'ultime Panique qui nous déridera avant d'aller nous prélasser sur des plages lointaines. Une dernière émission, brillante comme il se doit, comme les dizaines d'autres qui l'ont précédée, et qui t'ont permis de prétendre à des honneurs croissants, d'une place de choix chez Bonnaud à la double page dans le Monde 2, en passant, bien sûr, par un festival new-yorkais dont il me tarde de connaître l'issue.
Alors voilà, Philippe, lors de cette dernière émission, j'aimerais que tu me fasses signe.
Depuis des mois que je mendie ton attention, que je supplie tes mots et que je me prosterne à tes pieds pour qu'enfin, une seule parole de toi me libère, jamais tu ne daignas soulager ma peine. Ni ici, ni sur les ondes où je te suggérais pourtant quelques thèmes audacieux. Alors, dimanche, il me semblerait juste qu'enfin tu te manifestes. Evidemment, je ne m'attends pas à ce que, soudain, au détour des aventures de Monique et Jean-Claude, tu t'interrompes pour saluer ma tendre entreprise. Non, ce que j'aimerais, c'est que, au gré de ton envie, tu glisses au creux de tes mots une phrase, un titre, que tu aurais trouvés ici, et que je reconnaîtrais, même si je suis la seule.
Ça n'est pas grand chose, cher Philippe, et cela réjouirait mon âme, mon coeur, et raviverait la flamme de l'amour que je te porte, et surtout des mots que, chaque semaine, j'ordonne ici pour toi. Par dessus tout, cela me donnerait l'envie de continuer, cet été, et plus loin encore, de me dévouer à toi.
D'une certaine manière, Philippe, tu me le dois bien, non pas comme une dette, mais comme un contre-don, et si tu hésites encore, rappelle-toi tes propres paroles. A l'heure où tu annonçais que la Panique au Mangin Palace était sélectionnée pour la finale du sus-nommé festival, tu ne manquas pas d'ajouter :

"Si nous gagnons, nous savons que vous pourrez toutes et tous réclamer un bout de cette médaille".
Philippe Collin, dimanche 10 juin, 11h59, F.I.

Eh bien voilà, pour moi, cette médaille, tu la portes déjà, et si je viens à toi aujourd'hui, c'est pour t'en réclamer, amoureuse, le bout qui m'en revient.

A toi pour toujours,

Valentine


Francis Picabia, La Nuit espagnole, 1922