26 mars 2007

En-quête

Cher Philippe,

Je sais depuis hier que nous avons en commun le goût des énigmes policières, qui vient s'ajouter à celui du jeu que nous partageons aussi. Aussi me proposai-je de te conduire dans une enquête un peu particulière, en cinq étapes, à la manière de.
Ramenée à sa plus simple épure, l'aventure pourrait se résumer ainsi :

1. Valentine aime Philippe et décide de le poursuivre de ses assiduités.
2. Malgré des lettres quotidiennes, des coups de téléphone nocturnes et des filatures, Philippe ne la remarque pas. Changeant de tactique, Valentine décide de kidnapper Anne, la stagiaire de la Panique au Mangin Palace, et se présente comme stagiaire auprès de Philippe.

3. Quoique charmé par cette nouvelle recrue, Philippe s’inquiète de la disparition d’Anne, et contacte au bout de trois jours le commissaire du quartier. Ce dernier vient enquêter incognito et découvre assez vite le pot aux roses. Ayant réuni les preuves de la culpabilité de Valentine, il débarque à l’improviste à la Maison de la Radio, afin de confondre la jeune femme.
4. L’hôtesse d’accueil tente de lui interdire l’accès au bureau de Philippe, au motif que ce dernier est en réunion. Passant outre, le commissaire fait irruption dans le bureau de Philippe, et le découvre en train de faire l’amour à Valentine. Sans perdre son sang-froid, le commissaire dévoile à Philippe le nom de la coupable, et lui annonce par ailleurs que ses services ont retrouvé Anne.
5. Déchiré entre l’indignation et sa passion naissante pour Valentine, Philippe finit par lui pardonner, et lui propose, quelques temps plus tard, de l’épouser.


A présent, voici ce que donnerait le premier épisode :

Première partie.

Le 25 mars 2007, vers onze heures, le radio-réveil, qui trônait sur la petite table de bois bleu faisant office de chevet à la tête du lit, se mit à grésiller, crachoter, puis le son de la station emplit la pièce.
Une voix féminine s’éleva, énuméra les titres du journal et se lança dans une litanie longue et monocorde. On avait publié des sondages qui divisaient les spécialistes, et les élections qui approchaient avaient toutes les chances de se jouer dans un mouchoir de poche, ce qui, au dire des mêmes spécialistes, ne laissait rien augurer de bon. A Paris, les syndicats appelaient à une grande manifestation pour le lendemain, afin de protester contre la garde à vue abusive dont avait été victime, l’avant-veille, la directrice d’une école maternelle. Dans la même ville, les supporteurs du club de football local se désolaient de voir leurs joueurs s’enfoncer dans la zone de relégation, tandis qu’à l’échelle du pays, tous les amateurs de sport saluaient la victoire de l’équipe nationale. Les mêmes se félicitaient des excellents résultats de la jeune championne de natation qui faisait, depuis quelques temps déjà, la fierté de la nation.
Enfin, le journal cessa ; et la voix féminine, soudain plus enjouée, plus malicieuse, annonça l’émission suivante et céda l’antenne à l’animateur de la Panique au Mangin Palace.
Une jeune femme de trente-trois ans, à longs cheveux et qui sortait à peine des brumes du sommeil, restait immobile dans le lit, pelotonnée sous la couette qui lui apportait encore la douceur de la nuit. Les yeux mi-clos, elle se laissait bercer par le générique d’une émission qu’elle connaissait ; puis elle reconnut l’inflexion de la voix qu’elle chérissait, le cérémonial sonore dont elle anticipait le déroulement, les mots qu’elle savait par cœur ; et bientôt, la musique s’évanouissant, elle laissa échapper un petit gémissement de contentement.
Mademoiselle Valentine, nouvellement célibataire, profitait des derniers instants précieux de la matinée avant d’aller affronter le cours du long dimanche, où elle devait se languir tout le jour. Son fiancé, avec la cruauté de ceux qui n’aiment pas, lui avait signifié son congé ; elle avait cessé d’en pleurer la veille seulement, bien que l’événement remontât à plusieurs semaines, et elle se dédommageait de n’être plus aimée en se laissant bercer par la voix de celui qu’elle imaginait aimable.
Philippe.
Valentine pensait aux mots tendres qu’il lui dirait, aux caresses qu’ils échangeraient, au bonheur de vivre à ses cotés, à l’amour qu’ils feraient ensemble. Elle se rappelait la première fois qu’elle l’avait entendu. Ça avait été comme une révélation. Il avait une voix chaleureuse, avec des accents parfois un peu plus vifs qui relevaient le rythme de ses phrases. Son débit rapide, s’accélérant puis ralentissant soudain avant de repartir de plus belle, séduisait l’esprit et semblait défier aimablement l’oreille de ses auditeurs. Son humeur joyeuse, égale, rehaussée d’un éclat espiègle, se communiquait à qui l’écoutait.
Jamais elle n’avait entendu cette vivacité de son esprit agile, la liberté de son ton, ni cet allant de propos qui sonnaient toujours justes. Elle recevait son discours avec religion, comme quelque chose d’extraordinaire. Aimait-il ? Quels étaient ses goûts, sa vie, son passé ? Elle souhaitait connaître les traits de son visage, l’éclat de ses yeux, toutes les expressions qu’il prenait pendant l’amour, les vêtements qu’il portait, les draps dans lesquels il dormait, les amis qu’il comptait ; et le désir de le toucher même s’effaçait devant une faim plus impérieuse, dans une curiosité douloureuse qui n’avait pas de limites.
Une virgule sonore signala la fin de l’émission, la voix bien-aimée fit entendre ses dernières notes. La journée continuait, on se retrouverait dimanche prochain, et d’ici là, il ne fallait rien lâcher. Et Valentine se réjouit d’entendre ces mots, comme s’ils n’avaient été adressés qu’à elle. Puis elle songea qu’il faudrait attendre sept longs jours avant de retrouver pareille félicité, qu’elle se condamnait à se consumer d’un vain amour pour un homme qu’elle ne reconnaîtrait pas si elle le rencontrait, qu’elle s’apprêtait à sacrifier le tout de sa vie à celui auquel elle ne laisserait même pas un souvenir.
L’heure était à la gravité. Comment obtenir qu’il la vît ? Et elle n’imagina rien de mieux que de lui écrire.

Fin de la première partie.


Voilà, cher Philippe, il ne tient plus qu'à toi, et à ceux qui me liront, que je dévoile la suite de cette aventure, et que je livre le secret du puzzle qui n'en est pour l'instant qu'à la première pièce. Et sois assuré que toute suggestion sur la meilleure manière de faire sera la bienvenue.

A toi pour toujours,

Valentine

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Intinéraire imprévisible d'un dimanche comme les autres

Comme un dimanche sans histoire, tout commençait par un réveil plus que progressif. Où les phases menant vers la lucidité et la verticalité trainaient en longueur.
Seulement, bien que mon état ne s'accordait alors pas à la reflexion et l'analyse, mon instinct, bien que planqué sous l'édredon, restait en alerte. Qu'on se le dise, quelque chose clochait sévère.
Je rassemblait donc les quelques matières grises déjà en activité au coeur de mon lobe frontal pour les faire sortir de leur utilité première à cette heure matinale, qu'on pourrait résumé à "est ce que téléfoot va enfin nous révéler les intentions de vote des amateurs du ballon rond pour ce satané 22 avril".
j'utilisais donc mes premières forces à une tout autre activité intellectuelle de haut vol: "comment suis-je presque réveillé aujourd'hui alors que mon radio réveil n'a pas encore fait son habituel office, à savoir me sortir de ma torpeur en récitant le jingle du Mangin Palace"?
Après quelques hypothèses saugrenues je devais me rendre à l'évidence, une vulgaire coupure d'électricité m'empéchait de faire partir ma journée sur des rails connus et ressurants.
Evidemment j'étais colère, et le lever serait donc placé sous des auspices moroses.
Seulement il en faudrait plus pour détruire ma journée de jeune homme dynamique. Je convoquais donc rapidement à mon esprit toutes les manières rationnelles de mettre fin à cette mascarade.
Personne de mon entourage n'enregistrait plus depuis belle lurette leurs épissions préférées sur cassette audio. "Julien, si tu crois que la technologie des années 80 va te permettre d'arriver à tes fins, tu te met le doigt dans l'oeil profond" Or mon esprit avisé et définitivement moderne ("en avance sur son temps" serait un peu présomptueux)me souffla que le web pouvait peut être m'être d'un précieux secours.
Me voici donc à arpenter le site de notre bonne vieille maison de la radio pour écouter mon émission préférée suscitée (tu remarqueras aisément que j'avais préalablement réussi à rétablir le l'électricité dans mon modeste appartement).
Je su donc vite que ce dimanche j'étais campagne présidentielle et président de la république. La classe en somme. Mais une classe de courte durée puisque l'émission touchait à sa fin aussi vite que ma frustration grandissait.
Je serai donc le dindon de la face dominical qui n'arriverait à rien de potable.
Que neni. La lueur qui toujours permet que l'espoir ne s'égare me fit me rendre compte que ce diable de Lucchini était passé en mon absence chez Don Bonnaud. Qu'est ce que Mr Collin pouvait bien avoir eu d'impertinent, drôlatique et total foutraque à dire à son propos?
Podcastons et attendons.
Evidemment les potentialités du net permettent d'écouter et de continuer de mettre le bout de son nez sur moultes pages et autant d'informations.
Bien qu'handicapé par une attention dissociée plus qu'imparfaite ("heureuses soient les femmes qui arrivent à faire plusieurs choses en même temps") je décidais néenmoins d'en savoir plus sur ce cher Philippe Collin en le googlant.
Un article de wikipédia, le site de france inter et un blog. "Jesuisamoureusedephilippecollin"
Plus curieux tu meurs, je double clic sauvagement.
Me voici donc dans ton antre Valentine.
Tu dois déjà te dire "tout ça pour ça, il va falloir faire des efforts de concision si tu veux que je te lise en entire la prochaine fois, parce que là tes délires narcissiques sur ton humeur au réveil ça interesse que toi".
Certes mais cette mise en contexte me semblait important pour mettre en évidence le coté non programmé et surprenant de ce que je découvrais là.
D'abord première réaction: "ça y est quand on fait de la radio on a le net à ses pieds, des blogs qui fleurissent, c'est la fête et toujours pour les mêmes". Ou plutôt "qu'est ce que c'est que ce truc?"
Bref j'avais envie d'en savoir plus si bien que j'ai remonté le temps par tes articles, suivi l'évolution de cet ovni du web et découvert ta plume, ta flamme, des passages ciselés ou touchants suivant ton humeur. Ta persévérance, ton amour du jeu, des énigmes, ta capacité à susciter l'interrogation et ton envie que s'expriment la curiosité et le désir de cet homme drôle et brillant sur lequel tu as jeté ton dévolu. J'y ai vu tout à la fois une des plus belle, persévrante, raffinée, décalée déclaration d'amour ainsi qu'un jeu de piste intime et brillant avec ceux qui découvrent ta page. (j'aime beaucoup aussi les images qui illustrent tes mots d'humeur amoureuse)
Vraiment je suis épaté.
Que Philippe se manifeste. Impossible de rester de marbre à la lecture de ce témoignage. Si tu continues à pas répondre je monte un blog "phiplippecollinestungoujat" ou "valentineméritemieux"
En tous cas j'ai très envie de continuer à te lire Valentine donc n'abandonne pas.
Julien

Valentine a dit…

J'aime bien, Julien, les récits des réveils dominicaux difficiles - et le mien ce matin l'a été particulièrement - alors ne t'inquiète pas, j'ai pris plaisir à te lire, même long, d'ailleurs je ne goûte pas fort la concision.
En tout cas, j'adore l'idée d'un blog philippecollinestungougeat, et ton message me donne envie de continuer, à un moment où, je dois bien le dire, je m'interrogeais sur la pertinence de poursuivre cette petite entreprise...
Merci, donc, et à bientôt sur ces pages, je l'espère.
Valentine

Anonyme a dit…

Ce petit texte, comme les billets qui ont suivi du reste, est délicieux. Quelqu'un d'aussi sensible est forcément "amourable" (merci Valentine d'étoffer mon vocabulaire), et tes chances de succès auprès de Philippe, pour peu qu'il s'attarde sur ces pages, ne font décidemment aucun doute... Je constate également que le mois de mars n'est pas favorable aux amours, et je le déplore chaque jour un peu plus, et un peu plus, et un peu plus... Heureusement que les mauvaises choses, comme les bonnes, ont une fin. Accroche toi à ça mon ami, et dabarrasse le plancher !
Bref, je repasserai avec plaisir faire un brin de lecture.
Sam