28 juin 2008

Silence ?


Tour à tour tristes et exaltés, soulagés et déchiquetés, ils s’observent en silence, hésitent entre effusion et distance, entre parler ou bien se taire. Ils se tournent autour, sans trop savoir comment s’y prendre.
Elle se lève et prépare deux thés, sort du frigo la bouteille de lait. Gestes empreints d’habitude, son corps connaît les emplacements et les distances entre chaque chose.
Éric la regarde se déplacer, il a les bras croisés. Depuis qu’elle est revenue, ils ne se sont pas touchés.
Elle évite son regard, puis affirme :

— Fais pas cette tête. Comme si t’étais responsable de quelque chose. Personne ne peut vivre avec moi. Déjà pour moi, je vais te dire, c’est pas facile de me supporter… Je ne peux pas me quitter moi-même. Moi aussi, si je pouvais, je me sauverais en courant.
— Je fais aucune tête spéciale. Je suis juste fatigué. Dure journée. Et ne sois donc pas si prétentieuse. Je vais me coucher.
Il se lève, la laisse toute seule dans la cuisine. A voix haute, pour personne, elle prévient :
— Je vais prendre une douche.
Puis se gratte la tête et à mi-voix, commente : pourquoi tu me traites de prétentieuse ?

...


Virginie Despentes, Bye-bye Blondie, Grasset, 2004.
Sophie Calle,
Douleur exquise, Exposition "M'as-tu vue", Beaubourg, 2004.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Aîe, aïe, aïe, mais quel est ce sombre et triste vent qui souffle sur ce blog depuis quelques jours ?

Ca sent la rupture, comme dirait Sarkozy (pas taper, merci). Certes, Philippe a terminé la saison et prépare sans doute, à cette heure, son départ pour de lointaines et vacancières contrées.
Serait-ce là la raison de cette mélancolie littéraire ? (avec, en plus, du Sophie Calle : c'est dire si la déprime est grave...)

Bon, au moins, la typo est impeccable : c'est ballot, mais finalement, ça manque de charme, je ne peux faire mon tatillon.