17 décembre 2007

Transport amoureux


Cher Philippe,

Au temps où Libé n’avait pas encore plongé dans une dérive giordano-schneckienne, il m’arrivait souvent d’en dévorer les pages, avec une attention toute particulière pour les petites annonces, où j’espérais toujours, midinette que je suis, trouver un message de l’inconnu sexy croisé un peu plus tôt dans le métro.
Cela m’arrive de moins en moins souvent, non pas d’échanger des regards troublants avec des inconnus sexy dans le métro, mais de lire ce journal – c’est un peu comme pour France Inter : je me promets de ne plus céder à l’appel de la nostalgie mais je finis toujours par y revenir, et je suis chaque fois déçue de ne plus y trouver ce qui en faisait le sel. Pourtant, j’y reviens. Et, parfois, la persévérance a du bon. Car figure-toi que ce week-end, j’ai acheté Libé dans un moment de désœuvrement, puis l’ai oublié au fond de mon sac après avoir parcouru les grands titres. J’aurais pu en rester là, et j’étais ce matin sur le point de le jeter à la corbeille quand, prise d’un étrange remords, je décidai de le feuilleter négligemment. Et voici ce que je découvris au milieu d’autres petites annonces :

Pour ma Valentine chérie,
bon anniversaire et
poursuis
ton beau chemin,
frambuesa des neiges.

Tu imagines sans peine l’accélération des battements de mon cœur au moment où je déchiffrais ce message.

Certes, tu n’ignores pas que je ne suis pas née de la dernière pluie, et encore moins le 15 décembre, mais qu’importe ! J’entends que tu me chéris, et m’encourages à poursuivre ma quête.
Certes, il aurait été plus simple que Jean-Claude et Monique se fassent tes messagers ici-même, mais cela aurait été moins poétique. On le sait bien, que le plaisir est dans la quête. N’est-ce pas Monsieur Kaplan ?
Enfin, cette framboise des neiges me fera rêver encore longtemps. Au moins autant que les autres annonces du jour, qui, à la lueur de ta déclaration, prirent tout à coup la couleur des énigmes les plus charmantes à mes yeux amoureux. Vois plutôt :

Ma jumelle, RDV 21 rue Biot.
Donne ton nom. Tu pourras lire
l’épilogue ce soir. Ton jumeau.

Hélas ! Je n’étais pas au rendez-vous. Hélas ! Je n’ai pas reçu le bouquet que tu avais fait composer pour moi chez le fleuriste du 21 de la rue Biot – décidément, je passe mon temps ces temps-ci à passer à côté des bouquets ! Mais s’il ne te manque que mon nom pour que nous écrivions ensemble le plus glorieux dénouement, je viendrai te l’apporter moi-même.

Un long silence le 27/11, 20h ??
le doute me rend silencieuse… !
Au vert du 21 au 29/12.
Je pense à toi. Redeviens
vite visible.
Je t’aime. XXXB.

Ainsi, mon silence qui n’en était pas un, et qui dura jusqu’au 2 décembre, t’alarma toi aussi ? Que ne le disais-tu ? Je serais redevenue visible bien plus tôt. Rassure-toi, moi aussi je t’aime, moi aussi je pense à toi. Et si je serai bien au vert du 21 au 29, ce sera pour mieux écouter ta messe du midi le 23.

Toi belle sorcière, moi naïf,
À la fac, puis à la manif.

Si tu en as envie,

Retrouve-moi à la mairie !


Il n’est pas si naïf celui qui sait si bien m’entraîner dans son jeu…
La mairie, Philippe, la mairie… En es-tu bien sûr à présent ? Tu sais que je ne pense qu’à ça, mais je ne voudrais pas que tu te sentes captif de mes sortilèges.

Message subliminal ? Le 3
Voir le ma-lotru (vers l’an)

Et si « Mme BOV C moi ». GF.


Subliminal : j’avais raison de vouloir lire entre les lignes de ces petites annonces ! Et puis, si je suis la mal-aimée, tu es le malotru – rappelle-toi ceux qui te menacèrent naguère de lancer un blog philippecollinestungougeat Quant à Madame Bovary, elle me ressemble autant qu’à toi…

Palmyre je t’ai choisie et aimée
avec tout ce que tu es.
Je te choisirai encore à l’aurore…
Réma

Cette énigme me plaît plus que toutes les autres : Palmyre la syrienne, placée sous le signe de Zénobie, la plus belle, la plus fine et la plus éclatante des reines. Vois ce qu’en dirent les plus grands historiens :

Zénobie se disait descendue des anciens rois macédoniens qui régnèrent en Égypte : sa beauté égalait celle de Cléopâtre, et elle surpassait de bien loin cette princesse en valeur et en chasteté. (...) Zénobie était encore la plus belle des femmes. Elle avait le teint brun, les dents d’une blancheur éclatante, une voix forte et harmonieuse, et de grands yeux noirs, dont une douceur attrayante tempérait la vivacité. L’étude avait éclairé son esprit, et en avait augmenté l’énergie naturelle. (E. Gibbon, Histoire du déclin et de la chute de l’empire romain, 1776-1788)

Que tu me compares à elle me charme.
Que tu veuilles me choisir encore à l’aurore, quand les mille et un contes que je t’offre chaque nuit auront fini de captiver ton cœur, m’enchante.
Que tu te dissimules derrière le masque de Rémi et d’Elsa, réunis pour l’occasion, me réjouit et me paye du silence de leurs parents.

Pas de doute
51… je t’aime
F. L’amoureuse


À cet instant, mes derniers doutes s’envolent, et mon bonheur éclate à la face du monde !


À toi pour toujours,


Valentine



Mon intégrité m'oblige à avouer que, si ces sept annonces se trouvaient bel et bien dans Libé samedi, je me suis permis de modifier quatre lettres de celle consacrée à Palmyre...

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Chère valentine,

Libération vous a libérée de vos récentes turpitudes et c’est une bonne nouvelle. À l’approche de ce solstice d’hiver qui précède toute renaissance, ces petits plaisirs d’amour vous vont bien.

(bon, de mon côté, j’avoue que j’ai quelques difficultés à raccorder certaines initiales, ou certains noms, à l’amour qui vous unit, Philippe et vous, mais bon, je m’en voudrais beaucoup de gâcher votre joie par mes réflexions tatillonnes)

J’ai l’honneur et le plaisir de confirmer que le plaisir est bien dans la quête. Et même que plus l’attente est longue, plus le plaisir est intense. Il faut avoir attendu et patienté pour goûter pleinement la saveur des victoires – et Philippe, s’il reste muet sur votre blog, vise sans aucun doute la plus prodigue des issues à votre Guerre d’Amour.

Cela dit, il me semble que vous avez, parmi ces jolies bouteilles à la mer lancées par Philippe à votre attention, négligé une opportunité de tout premier plan.

« Ma jumelle, RDV 21 rue Biot. »
« Donne ton nom. Tu pourras lire »
« l’épilogue ce soir. Ton jumeau. »

Philippe a lu Ce rêve étrange et pénétrant, c’est évident. Il fait de vous votre jumelle, à l’image du roi de Peau d’âne chérissant sa fille… Il transcende l’allégorie incestueuse pour faire de vous sa complice, sur un pied d’égalité, et même, même… vous proposait de vous révéler « l’épilogue », à savoir, cela paraît très clair, l’intégralité du scénario de la 100e ! Toute la Biot-graphie total foutraque de France Inter, qui ne sera révélée à nous autres, vulgum pecus, que le 23 décembre !

N’était-ce pas là la plus belle preuve de sa flamme à votre égard ?