15 septembre 2007

Pourquoi je suis amoureuse de Philippe Collin, I

Cher Philippe,

Je me suis toujours demandé quelle avait bien pu être ta réaction lorsque tu avais découvert ces pages à ta gloire, car je ne doute pas que tu les as découvertes. Surpris ? Ravi ? Excédé ? Curieux ? J’en suis malheureusement réduite à des conjectures, mais voilà comment j’imagine les choses.

Un jour que, désœuvré et vaguement déprimé, tu te sentis pris d’un irrépressible et bien compréhensible besoin de te rassurer sur ta notoriété, tu fis ce que tout un chacun fait en ce genre de situation : tu te googlas. Et là, l’une des toutes premières références te sauta aux yeux. Tu ne pus d’abord croire à son intitulé : quelqu’un, quelque part, déclarait au monde son amour pour toi ? Sans doute s’agissait-il encore une fois d’un site dédié à ton homonyme cinéaste, celui qui te disputait de manière assez déloyale la primauté des références - car vraiment, qui regardait de nos jours Les Derniers jours d’Emmanuel Kant ? Pour t’en convaincre, tu cliquas d’un air désintéressé sur le lien qui te faisait de l’oeil, et il fallut te rendre à l’évidence : c’était bien à toi que cette flamme s’adressait. Très vite, tu dus évacuer la seconde hypothèse qui t’était venue à l’esprit : ce n’étaient pas quelques-uns de tes amis qui te faisaient une blague ou une surprise, pour, disons, ton anniversaire. Non, c’était bien autre chose, comme te l’apprit la lecture de plusieurs billets : quelque part, dans Paris, une jeune femme pensait à toi. Elle t’écoutait avec ferveur et attention, elle rêvait de toi, et elle avait décidé de consacrer son énergie à te séduire, ainsi qu’elle l’annonçait sans vergogne en page d’accueil.

Ta première réaction fut la joie - être ainsi l’objet des pensées et des attentions d’une inconnue, gratuitement, flattait ton ego. Mais très vite, la colère dut remplacer la joie : qui étais-je pour m’arroger ainsi le droit de m’immiscer dans ta vie, fût-elle publique ? Pour t’imposer des sentiments si encombrants, dont tu n’avais que faire ? Tu décidas donc, après avoir fait le tour des pages, et chaque fois avec un sentiment d’oppression grandissant devant cette énergie qui te faisait violence, de ne plus aller y voir et de tenir ces pages pour rien. Tu les reléguas dans un coin de ta mémoire, à la frontière d’un inconscient qui n’avait pas intérêt à revenir frapper à ta porte. Si je voulais t’aimer, si je n’avais que ça à faire de ma vie, c’était mon problème, mais que je ne compte pas sur toi pour prendre part à la mascarade. Et tu te gardas bien d’en parler autour de toi, alors que ton tout premier réflexe avait été d’appeler ton meilleur ami pour lui faire part de ton incroyable découverte.

C’était sans compter sur le retour du refoulé.


A suivre...



Ernst Kirchner, Triumph der Liebe, 1911



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